J'ai vu le vent penser l'oiseau
J'ai vu l'oiseau penser le jour
J'ai vu le jour penser la terre
J'ai vu la terre penser le vent
J'ai vu le temps penser l'endroit
J'ai vu l'endroit démoli
J'ai vu le monde démoli
J'ai vu la puissance démolir la pensée
J'ai vu la pensée penser sa démolition
J'ai vu l'amour destructurant
Je me suis vu
Courrir
Mes jambes
Mes bras
Ma course embrassait
Le mouvement de la promesse
Des souvenirs démolis
Ma course démolie
Joyeuse démolie
Dans le vent qui me pensait
Un oiseau
Une chose n'est désirable que parce qu'elle est un choix.
J'aime marcher. C'est un plaisir. Je marche quand l'envie m'en prend et alors je sais que marcher est une chose désirable.
Si je suis contraint de marcher jour et nuit, alors marcher est un devoir non désirable. Ici, marcher est devenu une torture.
Une chose à laquelle on ne peut échapper est une torture.
Une interrogation surgit alors :
La fiction est elle désirable ?
Chercher à résoudre un problème,
C'est ne pas lui laisser la chance
Ce n'est pas se laisser la chance à soi-même
D'éprouver la possibilité et même le soupçon,
La lucidité,
Que, peut-être,
Je suis vivant,
Et que cela mériterait tout de même un petit peu d'attention.
Ici, le rire est une attitude nécessaire et suffisante
Qui ne connaît aucun équivalent
Pour quiconque chercherait une ultime responsabilisation.
Je suis
Poète.
Je suis
Fait pour la traque.
Je suis
Poète.
Je trouve.
Quand tu lis que je pense,
Tu penses ce que je pense.
C'est parce que je pense
À ta place.
Et cela c'est parce que je suis
Poète,
Et que mon ciel est ton corps et
Que ton corps pense dans mon corps,
Et que ma pensée dans ton corps
Est comme ton ciel,
Que ton ciel est mon corps,
Et que la pensée du ciel est le corps inconscient de ton frère.
Je suis poète
Parce que quand tu me lis tu
Decouvres
Que tu es le frère siamois du ciel,
Que ton frère siamois est un ciel englué
De morceaux volants
De poètes.
Le matin,
Le matin et ses nuages couchés,
Le matin et les rayons de nuages couchés,
Le matin et ses rayons couchés de nuages,
Le matin blanc et les rayons couchés de ses nuages blancs étalés,
Le matin étalé de blanc et ses rayons étalés en nuées de nuages couchés couvrant le soleil,
Le matin et les rayons couchés blancs de nuages blancs couchés dans les sols inversés du ciel, du sol inversé des ciels nuageux des rayons blancs caressant le paysage épais du matin petit soleil blanc,
Petit soleil froid et blanc du matin dans les rayons de nuées du sol inversé par l'épaisseur couchée,
Matin blanc de nuages couché,
Matin couché des nuages blancs rayonnants.
Mon ciel,
Il n'est que le matin et déjà ta beauté me condamne
À l'épaisseur verticale à
La sidération mutique au
Bégaiement blanc de mon humanité.
Vous êtes, poètes,
Cette mélodie qui accorde au monde
Les êtres pensants.
Vous êtes, poètes,
À l'image d'Orphée,
Ces êtres indispensables
Qui négocient
La volonté des dieux.
Ne vous retournez pas,
N'attendez pas que l'on vous suive,
Chantez, laissez la
Matière en vibration et
Disparaissez !
Il ne doit rien rester d'autre
Que l'autorité et
La lumière du vent
Dans laquelle
Vous vous serez évanoui
Par le chant.
Furetez dans les ombres
Et mettez vos corps
Sur l'autel du dicible. Faites
Couler les râles comme
De la vermine grimpante
Au pieds de cette humanité.
Ainsi seulement
Elle recommencera
À danser.
Il y a dans l'invisible, une dimension plus concrète encore que le mystique.
Il y a dans l'invisible, l'interface d'une articulation qui lie
Qui lie l'être à son espace.l'être à son espace.
La parole est cette substance qui change l'essentiel en factuel Et
Détériore l'espace et le concret pour ne faire de la
Vérité
Qu'une triste chimère intellectuelle où
Fond rongée creusée trouée aBîmée
La beauté.
Je me suis moi-même perdu dans l'ivresse vertigineuse et
Raisonnable de
La poésie littéraire.
Une fois perdu et noyé dans le charbon social de la pensée,
J'ai pu constater ma
Mort organique et
L'extinction totale de mon lyrisme poétique.
Ce fut une extinction interminable.
Ce fut une disparition douloureuse
Dans une inconscience persistante.
Sortie de la matière,
Il ne restait plus que le mouvement nu :
« le mouvant ».
Mon ventre était son interprète,
J'étais son organe.
Tout n'était plus que Fantasia :
Lumière chaude articulant le corps et l'esprit dans l'interface du vivant, mon humanité était poète et
Ma parole maintenant
Est intouchable.
Il est aisé de se décharger avec des maximes abstraites. Le regard est le miroir de l'âme est une belle vérité seulement quand celle-ci est investie.
Le regard est un investissement.
Il ne parle de nous seulement quand nous faisons l'effort de l'habiter.
Il ne parle de nous que lorsque notre regard est traversé par un autre regard et qu'il nous est essentiel que cet autre regard trouve ce qu'il cherche, c'est à dire quelqu'un.
Regarder un regard est un dialogue.
C'est par la qualité d'un regard qu'on trouve l'être dans la justesse de ses états.
C'est par dessus ce dialogue ineffable que la parole prend tout son sens.
De la même façon,
C'est par la qualité du regard que l'on reconnaît les désincarnations.
Tuto désincarnation :
1 – Déconsidérer son ressenti par la volonté seule.
2 – S'identifier à une présence extérieur comme une idée ou une voiture.
3 – Déconsidérer son ressenti jusqu'à l'oubli et y éprouver un soulagement abstrait.
4 – Entraîner son regard à la vacuité en regardant des écrans proposant des sensations désaffectées et des émotions inappropriées.
5 – Faire de cet entraînement une hygiène et une activité principale, au mieux essentielle.
6 – Perdre toute capacité de concentration et d'adaptation.
7 – Améliorer son déni pour l'appliquer dans des addictions et responsabiliser autrui.
8 – Accuser des inconnus sur votre situation permettra de tenir la barre dans l'irresponsabilité de façon tout à fait autonome et tenace.
L'enfant occidental apprend des regards.
Le regard est un organe de la culture, c'est un art.
Les enfants occidentaux apprennent
La désincarnation.
Tous les outils nécessaires sont à leur disposition.
Le théâtre ne peut être qu'une discipline littéraire et élitiste.
Il doit être mystique et populaire.